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Orphelinat RAWA

"There is no school, there is no education, what should I do?"

Visite d'un orphelinat mis en place et géré par RAWA, près d'Islamabad

 

RAWA est la seule association Afghane a avoir mis en place des structures d'accueil pour les orphelins de la guerre et des atrocités commises par les fondamentalistes. Malheureusement, l'association n'a pas les moyens d'accueillir tous les enfants dans cette situation. Elle recueille donc les jeunes filles les plus porteuses d'espoir pour la lutte contre les fondamentalistes, c'est-à-dire les plus intelligentes, les plus sensibilisées. RAWA les recueille dans des foyers comme celui où nous avons passé une matinée, en compagnie des 30 jeunes filles qui y habitent. Ce foyer est situé à quelques kilomètres d'Islamabad, mais dans la mesure où il est clandestin nous tairons le nom de cette ville. Les voisins croient qu'il s'agit d'un orphelinat financé par un riche indien de la ville.

Certaines des jeunes filles du foyer y habitent depuis plusieurs années, d'autres arrivent juste d'Afghanistan où elles ont perdu leurs familles lors des combats entre les différentes factions islamistes ou à cause des nombreuses exécutions sommaires menées par les Talibans. Elles sont souvent filles d'anciennes membres de RAWA. Quelques unes ne sont pas orphelines mais ont été acceptées pour s'être montrées particulièrement concernées par la situation politique de leur pays alors que leur parents n'avaient plus les moyens d'assurer leur éducation. On peut trouver ce système de préférence élitiste et très durement inégalitaire, puisque les enfants moins intelligents mériteraient autant de pouvoir survivre et d'être éduqués dans des conditions décentes. Ici encore, RAWA raisonne de la manière la plus pragmatique possible, il s'agit de la survie du mouvement et de la poursuite de la lutte contre le fondamentalisme. Ce qui n'empêche pas les membres de regretter de ne pouvoir offrir un toit, de la nourriture et l'accés à l'éducation à tous les enfants afghans.

Les jeunes filles se lèvent à six heures, et vont à l'école de 7 heures à 14 heures. Elles sont scolarisées dans le meilleur lycée de la région, où l'ensemble des cours est donné en anglais. L'après-midi, après une sieste, elles étudient puis préparent leur repas du soir. Le soir, elles se réunissent et écoutent le canal régional de la BBC, en farsi (langue dominante en Afghanistan), après quoi elles restent seules entre elles pour discuter de ce qu'elles ont entendu à la radio à propos de leur pays. Plusieurs fois par semaine, elles rencontrent en groupe une militante de RAWA qui leur explique l'histoire politique et les enjeux actuels de l'Afghanistan. Apparemment, toutes les armes leurs sont donc données pour qu'elles puissent avoir une vision à la fois poussée et critique sur la situation de leur pays, ainsi que la capacité à pouvoir agir à une échelle plus internationale grâce à la maîtrise de l'anglais.

Toutes souhaitent lutter plus tard contre le fondamentalisme et travailler à améliorer les conditions de vie de leur peuple:

"Je m'appelle Nasreen, j'ai 15 ans. Je veux devenir journaliste pour aider mon pays. Je voudrais que le monde sache enfin ce qui se passe dans mon pays. Pour qu'on ne puisse plus fermer les yeux et faire comme si la situation était normale."

 

 

 

 

 

"Je m'appelle Johra. Je veux devenir médecin. Il n'y a personne en Afghanistan pour soigner toutes les victimes des Talibans. Je sais que je suis une femme et que je n'ai pas le droit d'être médecin dans mon pays, mais je veux le faire quand même. Plus tard, je veux aussi travailler pour RAWA. C'est la seule solution pour lutter contre les fondamentalistes qui font couler le sang et les larmes dans mon pays."

"Je m'appelle Naheed. Je veux être enseignante. Mon pays a besoin d'éducation. Les écoles sont fermées, les enfants ne savent plus lire ni écrire. Ils ont tout ruiné. Je veux travailler pour RAWA, pour aider mon pays."

Cliquez ci-dessous pour entendre les jeunes filles s'exprimer (en anglais)

{Icone} sur la situation en Afganisthan, les talibans et Massoud

{Icone} sur le rôle à jouer par la communauté internationale

Les jeunes filles nous ont montré une des "functions" qu'elles ont l'habitude de donner pour sensibiliser les visiteurs à la situation de l'Afghanistan. Le petit spectacle, donné avec un certain ton solennel, comprenait discours, lecture de poèmes de Meena (la fondatrice de RAWA, exécutée par les Talibans), chants patriotiques et enfin une courte pièce de théâtre, dont vous trouvez le script approximatif dans l'encadré ci-dessous. Ces petits exercices souvent répétés permettent aux jeunes filles d'apprendre à s'exprimer en public sans peur et de manière persuasive. Il nous a semblé qu'ils jouaient un rôle important dans la formation de ces futures militantes de RAWA. Quant à la pièce de théâtre, en plus de permettre aux spectateurs de mieux prendre conscience de ce qu'est la vie quotidienne en Afghanistan, elle permet sûrement aux jeunes filles d'extérioriser leur douleur et la violence dont elles ont été les victimes.

{Icone} Ecouter le chant en hommage à Meena, fondatrice de l'Association Revolutionnaire des Femmes et assassinée en 1987 par des membres du Hezb-e-Islami.

{Icone} Ecouter un chant patriotique : " C'est un chant à propos du savoir et de l'apprentissage. Notre pays a été detruit par manque d'éducation. Les enfants mendient au lieu d'aller à lécole et travaillent pour survivre. Tant que tu es vivant, ne baisse pas les bras, continue à te battre pour apprendre."

Acte 1

Une mère épluche des légumes, assise auprès de sa fille. Tout-à-coup, sa deuxième fille entre en pleurant dans la pièce. Elle crie: "Les Talibans, les Talibans! Les Talibans sont là, Maman, j'ai peur ils vont venir, j'ai peur!" "Calme-toi, ma fille, calme-toi... Occupe-toi plutôt de ta petite soeur." La jeune fille s'assied aux côtés de sa petite soeur, qui égrenne une par une les lettres de l'alphabet. Mais bientôt la porte claque et deux jeunes filles grimées en Talibans entrent en hurlant. "Ils" arrachent le livre des mains de la soeur, mais voyons c'est interdit d'apprendre à lire en Afghanistan! Puis ils regardent avec intérêt la fille aînée "Oh, mais dis-moi mon frère, tu as vu ce beau morceau! -Mais oui mais oui..."

Ils la saisissent violemment et l'emportent, la mère proteste, tout le monde crie et c'est la bousculade sur la scène improvisée. Les jeunes filles se déchaînent pour mimer cette violence et les cris déchirant de la mère épleurée nous font oublier que nous avons ri quelques minutes avant, à l'apparition des faux Talibans. Ses larmes ont l'air trop sincères, et les phrases qu'elle répète, hébétée, sonnent trop juste. "There is no school, there is no education, what should I do? And now they have taken my daughter away, my dear daughter, oh my God what should I do!" Elle enfile sa burka et sort précipitemment avec sa fille.

Acte 2

Deux vendeurs de rue font la criée. "Shaï, shaï, my shaï is good!" Les deux Talibans passent, au grand malheur des deux autres, puisqu'un n'a pas la barbe très longue et l'autre est carrément rasé de près.(Les hommes sont obligés de porter la barbe en Afghanistan, symbole musulman de l'honneur et de la virilité.) Le premier passe un mauvais quart d'heure et ne peut éviter la prison, tandis que le deuxième s'en sort très bien, en disant qu'il est de Kandahaar, la ville où les Talibans sont basés. Tout le monde rit dans la salle devant la partialité de ces brutes ridicules.

Puis la mère et sa fille entrent sur scène de nouveau. "Oh oh, mais que vois-je là, mon frère! Cette femme-là porte un pantalon blanc! (tout vêtement ou sous vêtement autre que noir est interdit aux femmes)" -"Oui, je vois bien mon frère, et regarde-moi ces chaussures à talons! (les chaussures à talons sont aussi interdites en Afghanistan)". A partir de là, le réalisme est abandonnée: la mère riposte, elle enlève rageusement sa burka, ce qui normalement lui voudrait, au mieux de l'acide jeté en pleine figure, au pire la mort par lapidation publique. Elle crie: "Quoi, qu'est-ce qu'il y a avec mon pantalon blanc, qu'est-ce que vous avez contre mes chaussures! Demandez-vous plutôt ce que vous avez fait à ma fille, ma chère fille! Vous êtes des monstres!" C'est de nouveau une explosion sur scène, les Talibans frappent la mère et sa fille qui crient et se débattent. Puis les vendeurs s'y mettent aussi, c'est la bousculade généralisée à grand renfort de décibels. Encore une fois, la violence exprimée nous touche douloureusement. Finalement, les deux Talibans s'enfuient, et la mère reste seule sur scène, effondrée. Elle crie d'une voix déchirée et entrecoupée de sanglots... décidément on se demande d'où vient ce talent d'actrice. Est-elle très douée ou est-elle extrêmement expressive parce que jouer lui permet d'exorciser toutes les souffrances qui la hantent?

{Icone} Ecouter un court extrait de la pièce (une minute)

Ces jeunes filles nous ont en tout cas beaucoup émus, et surpris par leur maturité. On comprend qu'elles ressentent parfois un petit malaise face à leurs camarades de classe, qui ne se préocuppent que de mode et de leurs états d'âme d'adolescentes. Cet article a été achevé deux semaines après que nous ayons quitté le Pakistan, ce qui lui donne un éclairage un peu différent. Nous pensons à elles en ces jours quand même un peu sombres pour l'Afghanistan. Leur rêve était que l'Afghanistan soit en paix et que leur peuple n'ait plus besoin de se battre pour survivre. Malheureusement, deux tours ont été réduites en poussières dans le sang à l'autre bout de la planète, et cette barbarie a rappellé à la communauté internationale l'existence de l'Afghanistan...pour qu'elle décide que toutes ces femmes, ces hommes et ces enfants n'avaient pas encore assez souffert. En plus des atrocités et de l'oppression d'un groupe de fanatiques, les Afghans vont vraisemblablement devoir subir la sévère punition réservée à ces fondamentalistes par les Etats Unis et leurs nombreux soutiens.

RAWA va continuer à lutter aussi longtemps qu'elle le pourra pour la liberté et la paix dans son pays. Mais tout ce courage et cette énergie pourraient finir par être gaspillés si nous ne prenons pas conscience que la politique internationale est criminelle et absurde, que nos gouvernements et nos commissions au sein des organisations internationales sont censés nous représenter et être démocratiques. Etes-vous d'accord pour que votre pays soutienne politiquement et militairement des bombardements dans un pays déjà exsangue, étranglé par des fondamentalistes arrivés au pouvoir grâce à la CIA, parce qu'un homme, lui-même formé par la CIA, est suspecté sans aucune preuve d'un attentat horrible? Bien sûr que non, mais qui poserait une question aussi saugrenue, et qui se soucie de la réponse? En tout cas, Nasreen, Johra, Naheed et les autres se poseront sûrement la question en écoutant la BBC, et lors de leurs débats nocturnes, à quelques heures d'avion de nos préoccupations quotidiennes.

Pour plus d'informations sur le rôle joué par la CIA dans l'arrivée au pouvoir des Talibans et dans l'ascension de Ben Laden, reportez-vous au site du journal alternatif américain www.zmag.org .

Chach, Ana et Marianne

 
 

 

 



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